Il faisait chaud hier soir au Théâtre La Chapelle, qui accueillait les Érotisseries, présentées par la troupe d’arts carnavalesques et circassiens Carmagnole. Du cirque érotique? Hum…avec plaisir…
Carmagnole a invité son public à une véritable expérience émoustillante et confrontante qui, avant même le début de la représentation, obligeait le spectateur à réfléchir à son désir de participer à l’aventure de façon active (le public mouillé) ou plus passive (le public sec, voyeur). Bon, je l’avoue, j’ai préféré la position du voyeur (question d’humeur du moment).
Dans un joyeux bordel, les « sextateurs » ont pris place autour de la scène pour les « mouillés », et dans les gradins plus traditionnels pour les « secs ». La formule cabaret du spectacle présentait une quinzaine de numéros, explorant diverses facettes de l’érotisme.
Du club de danseuses nues à la littérature érotique, en passant par la figure emblématique de la geisha ou la dérangeante érotisation de l’enfance, cette édition des Érotisseries questionnait notre rapport au désir, et à ses manifestations diverses. Nudité, sexualité explicite sont autant de moyens de donner au spectateur l’occasion d’aiguiser ses sens, tout en enviant la rafraichissante liberté de jeu des performeurs. En présentant ainsi des tabous de façon aussi décomplexée, on en vient à questionner sa propre gêne face à la sexualité et à ses fantasmes. La confusion des genres portée par la figure récurrente de la geisha (interprétée par un homme) vient également complexifier et nuancer la portée du propos. Bien entendu, la palette d’illustrations érotiques proposée par Carmagnole est suffisamment large pour faire résonner en chaque spectateur une envie, un désir, une question. En observant le public, on pouvait deviner la variété des fantasmes et des désirs suggérés, variant d’un numéro à l’autre.
Parmi mes coups de cœur (et oui, le cœur aussi était là), il y a eu notamment la beauté de l’abandon d’un corps inerte, cette danse macabre du géant (Cyril Assathiany) et de la femme sans vie (Éliane Bonin), totalement possédée, traînée à terre, retournée, dépliée, offerte dans toute sa nudité. Un flirt avec l’érotisme nécrophile (?) interprétable à l’infini, certes, mais subtilement dérangeant. Et puis, la performance acrobatique de Jonathan Fortin, en virilité pure, musculeuse et désirable au bout de ses sangles aériennes a contrasté avec une autre vision de l’érotisme, portée par la très habitée Marjorie Nantel, enceinte d’environ 8 mois, qui flotte dans ses tissus aériens, au-dessus de spectateurs allongés (les mouillés, forcément) dans un ballet gracieux et émouvant…mais toujours érotique. Des images fortes alternant avec des postures plus légères, mes désirs ont été (presque) comblés.
En quittant la bulle de Carmagnole, dans une chaleur moite (le metteur en scène m’a confié avoir volontairement fait augmenter le chauffage…), j’avais envie de poursuivre l’exploration des sens…un booty call/chat? une rencontre furtive avec un ancien amant? une perle de sueur sur une peau désirée? Bref, j’étais cuit à point, prêt à être servi. Un autre miracle des Érotisseries.
Crédit Photo : Frédéric Veilleux.
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